Luxembourg, le 6 avril 2022En octobre  2021, le Mouvement Écologique,  natur&ëmwelt a.s.b.l. et Greenpeace Luxembourg – membres de la plateforme Meng Landwirtschaft –, se  sont réjouis du succès obtenu par l’initiative citoyenne européenne “Sauvons les abeilles et  les agriculteurs”. L’initiative – signée par 1,2 millions de citoyens – a demandé une réduction  de  80 % des  pesticides  synthétiques d’ici  2030 et leur élimination  totale  d’ici  2035 afin  de répondre aux crises de la biodiversité et de la santé. Plus de 5.250 citoyens luxembourgeois  ont signé cette initiative européenne. 

La Commission européenne a reporté la proposition du règlement européen sur la réduction  des  pesticides qui aurait  dû être  présentée le  23 mars, en même  temps  que des  objectifs  contraignants de restauration de la nature.  

Depuis l’invasion  russe  en  Ukraine,  des  lobbies  tentent  d’utiliser  cette  situation  et  ses  répercussions  sur  l’approvisionnement  en  produits  agricoles,  notamment  en  céréales  provenant  de  l’Ukraine  et  de  la  Russie,  pour remettre  à  plus  tard la  réforme  urgente  de  l’agriculture intensive, grande consommatrice de carburants et de produits chimiques. 

Les risques de pénuries alimentaires ne trouveront pas leur solution dans une approche court termiste, ni dans le sacrifice de la restauration de la biodiversité et de la protection du climat. En effet, dans les pays riches plus de 60% des céréales sont destinées à l’alimentation animale,  ainsi que la production d’agrocarburants. L’UE importe des céréales d’Ukraine et de Russie  pour nourrir le bétail qui, à terme, est principalement exporté vers des pays tiers. Ce système  est très inefficace et repose exclusivement sur des céréales bon marché, dont la production  n’est pas soumise à la réglementation européenne et qui sont donc produites avec de grandes  quantités de pesticides et d’engrais de synthèse, ce qui nuit à la santé des citoyens et à la  biodiversité. 

La commission européenne a d’ailleurs envoyé un message urgent au Luxembourg (décembre  2020), afin de réorienter l’agriculture nationale vers une production moins intensive de lait et  de viande. La réduction du cheptel qui induira une réduction de l’utilisation de céréales pour  l’alimentation animale permettrait de pallier le déficit de disponibilité céréalière consécutive  de l’invasion de l’Ukraine. 

Affaiblir les normes environnementales ou détruire des pelouses riches en biodiversité pour  augmenter  la  production  à  court  terme  n’est  en  aucun  cas  la  solution ! Au  contraire.

Accélérer  la  perte  de  biodiversité  d’avantage  va  augmenter  la  pression  sur  l’approvisionnement alimentaire à moyen et long terme.   

La  hausse  actuelle  des  prix  des  céréales  et  les  messages  alarmistes  des  lobbies  de  l’agriculture industrielle soulignent la fragilité du modèle agricole dominant de l’UE. Cette  crise  souligne  à  quel  point  une  réforme  systémique  de  l’agriculture  européenne  est  indispensable.  

Notre  dépendance  à  l’égard  des  engrais  et  pesticides  de  synthèse  et  des  importations  d’aliments pour animaux est une source majeure de faiblesse pour notre agriculture et il est  du devoir de nos décideurs d’améliorer cette situation. 

Le règlement sur la réduction des pesticides remplacera la directive de 2009 sur l’utilisation  durable des pesticides. La plupart des pays de l’UE n’ont pas mis en œuvre cette directive. Elle  a  donc  eu  un  impact  limité et  nous  avons  perdu treize  années depuis  l’introduction  de  la  directive. Il est désormais extrêmement urgent d’agir rapidement.  

Il est urgent de prendre des mesures beaucoup plus ambitieuses pour diminuer l’usage (et les risques) des pesticides de synthèse afin de lutter contre la crise de la biodiversité et de la santé  et pour garantir une production durable d’aliments sains. Les pesticides doivent être traités  comme des substances nocives et la réglementation doit être améliorée. 

La  plateforme  Meng  Landwirtschaft s’est  adressée au  Ministre de  l’Agriculture,  de  la  Viticulture  et  du  Développement  rural,  au  Ministre  de  la  Santé,  au  Ministère  de  l’Environnement,  du  Climat  et  du  Développement  durable,  aux députés  membres  des  commissions parlementaires concernées, ainsi qu’aux députés européens pour les solliciter  de veiller à ce que le Luxembourg prenne toutes les mesures nécessaires pour restaurer la  biodiversité  et  prévenir  les  dommages  à  la  santé,  à  l’eau  et  à  l’environnement,  pour  récompenser les agriculteurs qui travaillent avec la nature et garantir des prix équitables  pour une alimentation saine. 

La lettre en question est disponible ici