Vendredi dernier, à l’issue des négociations de l’Autorité internationale des fonds marins (AIFM), l’industrie minière en eaux profondes n’a pas réussi à obtenir son feu vert pour commencer le pillage des fonds marins. L’opposition à cette pratique destructrice s’intensifie au sein même de l’autorité, avec plus de 20 gouvernements exigeant une « pause de précaution ».

Des négociations sous haute pression

« L’industrie minière en eaux profondes était prête à planter ses crocs mécaniques dans le plancher océanique, mais son pari s’est retourné contre elle », explique Louisa Casson, chargée de campagne internationale pour les océans. « Les entreprises ont gravement sous-estimé le poids de la science et de la justice face à leurs intérêts spéculatifs. La mobilisation croissante du grand public a fissuré leur forteresse. Il est clair que la plupart des gouvernements ne veulent pas qu’on se rappelle d’eux comme ceux qui ont détruit les océans. »

En dépit des pressions de l’industrie, soutenue notamment par la Norvège, l’Île de Nauru et le Mexique, une majorité d’États, dont le Brésil, le Costa Rica, le Chili, le Vanuatu, l’Allemagne et la Suisse, ont refusé d’accélérer la mise en oeuvre d’une réglementation relative à l’exploitation minière en eaux profondes. Le leader du secteur, The Metals Company, a vu aussitôt le cours de son action s’effondrer, signe incontestable de la faible confiance des marchés. 

« Les investisseurs ne retiendront de ce qu’il s’est passé la semaine dernière qu’une tentative désespérée de l’industrie pour maintenir l’illusion qu’elle a encore un avenir. Si l’exploitation minière en eaux profondes était aussi durable qu’elle le prétend, et si son cœur était véritablement investi dans la lutte contre la crise climatique, pourquoi bloquer la dissidence ? Ces dernières semaines ont clairement montré que l’exploitation des grands fonds était non seulement irresponsable, mais aussi politiquement toxique. Le monde entier s’oppose à cette pratique. Il y a encore beaucoup à faire, mais notre détermination est sans faille », poursuit Casson. 

Lors de l’assemblée de l’AIFM, les pays favorables à l’exploitation minière ont en effet réagi en tentant de réduire au silence la contestation à l’endroit même où elle est censée faire l’objet de négociations : la Chine s’est ainsi opposée à une proposition des gouvernements d’Amérique latine, du Pacifique et d’Europe visant à la création d’un espace de débat. À l’heure où le droit de manifester et la liberté de la presse sont menacés partout dans le monde, des restrictions ont été imposées aux journalistes et aux activistes, le secrétariat du conseil de l’AIFM, soupçonné d’être plus qu’influencé par l’industrie, est même allé jusqu’à restreindre l’accès aux négociations du Conseil de l’AIFM : sur les trois semaines qu’ont duré les négociations, une seule a été ouverte aux Lors de l’assemblée de l’AIFM, les pays favorables à l’exploitation minière ont en effet réagi en tentant de réduire au silence la contestation à l’endroit même où elle est censée faire l’objet de négociations : la Chine s’est ainsi opposée à une proposition des gouvernements d’Amérique latine, du Pacifique et d’Europe visant à la création d’un espace de débat. À l’heure où le droit de manifester et la liberté de la presse sont menacés partout dans le monde, des restrictions ont été imposées aux journalistes et aux activistes, le secrétariat du conseil de l’AIFM, soupçonné d’être plus qu’influencé par l’industrie, est même allé jusqu’à restreindre l’accès aux négociations du Conseil de l’AIFM : sur les trois semaines qu’ont duré les négociations, une seule a été ouverte aux médias et les manifestations pacifiques ayant cours pendant les réunions ont été activement réprimés.

© Greenpeace

L’AIFM a cependant échoué à combler une faille juridique qui permet aux entreprises minières de d’ores et déjà demander une licence d’exploitation des grands fonds pour l’année prochaine. 

Une menace bien réelle, qu’un moratoire pourrait écarter

Le monde prend peu à peu conscience de l’importance de la menace que représente l’exploitation minière des fonds marins. Outre les milliers de personnes à travers le monde ayant signé notre pétition, 37 institutions financières, plus de 750 scientifiques et l’industrie de la pêche ont exigé l’arrêt de l’industrie aux côtés des peuples autochtones — les premiers touchés par cet enjeu de taille.« Dans le Pacifique, l’océan nous est particulièrement cher. Il influence nos vies et notre identité en tant que peuple. Le spectre de l’exploitation minière en eaux profondes soulève de nombreuses inquiétudes, qui nous rappellent l’héritage que nous ont laissé d’autres industries coloniales ainsi que l’ère brutale des essais nucléaires. Nous sommons les responsables mondiaux de mieux gérer nos océans, en se joignant à notre appel en faveur d’un moratoire », demande Joey Tau, chargé de campagne au sein du Pacific Network on Globalisation (PANG) depuis Suva, dans les îles Fidji.

Portrait de Joey Tau © Greenpeace / Randall Hicks

En tant que Greenpeace, nous estimons également que le meilleur moyen de mettre fin à cette industrie est un moratoire de protection, qui nécessite que davantage de gouvernements s’expriment en faveur de la sauvegarde des océans.  

L’urgence est donc plus que jamais présente pour les États de trancher sur la question. C’est maintenant que la bataille diplomatique et le travail de conviction commencent vraiment, sans attendre la prochaine réunion de l’AIFM l’année prochaine. 

Aidez-nous à faire grandir l’opposition à cette industrie destructrice en signant notre pétition.