La plus grande conférence sur le climat – la COP – vient de se terminer. Chaque année, elle réunit la quasi-totalité des nations pour discuter des plans et parfois signer des accords, comme ce fut le cas avec l’Accord de Paris en 2015. Bien qu’aucun événement ne puisse être une solution miracle, nos attentes étaient assez élevées. La COP reste tout de même la principale plateforme mondiale de discussion sur la crise climatique, et l’édition de cette année était particulièrement importante en raison de l’état d’urgence actuel.

Au début de l’année, le rapport 2021 du GIEC a déclaré un « code rouge pour l’humanité », tout en nous laissant quand même espérer que la limite de 1,5°C de réchauffement est encore à portée de main. Toutefois, pour y parvenir, nous devons prendre des mesures immédiates, drastiques et cohérentes. Malheureusement, le texte commun qui a été adopté après les négociations de la COP26 – le Pacte de Glasgow pour le climat – n’a pas été à la hauteur de nos attentes.

Actions réelles vs fausses solutions pour résoudre la crise climatique

La COP26 était censée être un événement charnière qui nous remettrait sur la bonne voie afin de pouvoir limiter l’augmentation de la température à 1,5°C. Cela n’a pas eu lieu. La conférence de cette année a finalement dépassé les attentes, mais livré moins que ce qui était espéré. Et voici ce qui s’est passé :

Mettre fin à l’ère des combustibles fossiles

Danish activist with hand banner reading "Fossils our our future"

Attente : 

Nous éliminons progressivement les combustibles fossiles et nous nous engageons à réduire de moitié nos émissions d’ici la fin de la décennie. 

Réalité : 

Un appel à la réduction du charbon apparaît pour la première fois dans un texte final de la COP. S’agit-il d’un changement positif? Oui. Est-il suffisant? Non. 
Nous devons encore réduire de moitié nos émissions mondiales d’ici la fin de cette décennie. L’année prochaine, les pays devront se réunir à nouveau afin de préciser dans quelle mesure et à quel moment ils réduiront leurs émissions. Pour le gouvernement canadien, cela implique de s’engager à les réduire de 60 % et de mettre l’accent sur une transition juste.

Faire preuve de solidarité envers les communautés vulnérables

Climate activist holding a sign: for climate justice.

Attente :

Nous faisons amende honorable et nous nous montrons solidaires des communautés vulnérables les plus touchées par les impacts climatiques. 

Réalité : 

Nous continuons à reporter des actions tangibles alors que les pays vulnérables subissent des pertes et des dommages réels dus à la crise climatique. Le Pacte de Glasgow pour le climat est loin de répondre aux besoins sur le terrain. 

Les attentes que la COP26 apporterait enfin un soutien réel aux communautés qui doivent reconstruire et se rétablir à la suite de catastrophes climatiques étaient élevées, mais le résultat est « une insulte aux millions de personnes dont la vie est déchirée par la crise climatique », comme l’a déclaré Teresa Anderson, coordinatrice de la politique climatique chez ActionAid International.

Cesser d’utiliser la nature comme une excuse pour polluer

A banner reading “NOT FOR SALE” against the iconic giant globe

Attente :

Nous devons cesser de nous fier à de fausses solutions comme les compensations carbones qui ne sont pas une réponse au dilemme climatique, mais des passe-droits permettant aux grandes entreprises de continuer à polluer.

Réalité : 

La supercherie des compensations est incluse dans le Pacte de Glasgow pour le climat. Bien que le Secrétaire général de l’ONU ait annoncé la création d’un nouveau groupe de spécialistes chargé d’examiner le rôle des compensations, il reste encore beaucoup à faire pour mettre fin à cette escroquerie qui laisse les grands émetteurs et les grandes entreprises s’en tirer à bon compte.

Pourquoi est-ce si mal? Parce que la « compensation carbone » est un système qui permet aux entreprises et aux gouvernements de s’« acquitter » de leurs engagements climatiques au détriment de la nature. Par exemple, dans le cas des compensations forestières, les entreprises tentent d’équilibrer les chiffres en plantant de nouveaux arbres tout en continuant à polluer. Le programme « Conduisez carboneutre » de Shell, une véritable astuce marketing, illustre parfaitement le fonctionnement de ce système.

Mettre fin à la déforestation

Recently deforested and burnt area in Porto Velho

Attente :

Nous mettons fin à la déforestation et respectons les droits des personnes autochtones.

Réalité : 

Le Canada et d’autres gouvernements se sont engagés à mettre fin à la déforestation. Mais cette situation illustre parfaitement pourquoi beaucoup de personnes ont été frustrées cette année à la COP – cela semble bien, mais il s’agit d’un engagement entièrement non contraignant qui manque de protections clés en matière de droits autochtones.


Et bien que le gouvernement canadien ait signé cette entente, il négocie simultanément un accord avec le Brésil qui pourrait en fait accélérer la déforestation en Amazonie, où le président d’extrême droite Jair Bolsonaro supprime les protections environnementales et ignore les droits des personnes autochtones.

Pourquoi les compensations carbone ne sont-elles pas une option pour le Canada?

Afin d’expliquer pourquoi le fait de se servir des forêts canadiennes pour compenser les émissions de gaz à effet de serre est une mauvaise politique publique et ne nous rapprochera pas de nos objectifs climatiques, Greenpeace Canada a présenté une soumission à l’Évaluation stratégique des changements climatiques. Plutôt que d’adopter une approche de compensation, nous plaidons pour des réductions rapides des émissions et une approche fondée sur les droits pour protéger et restaurer les forêts canadiennes en difficulté. Nous ne pouvons pas simplement compenser nos engagements climatiques. La nature ne peut pas servir de coussin de sécurité.

En premier lieu, la nature ne devrait pas être à vendre. La prémisse est fallacieuse : acheter la nature pour continuer à polluer. Cette approche ne relève pas de la justice, mais du maintien du statu quo. Donc, pour être juste, les grands émetteurs qui nous ont mis dans ce pétrin devraient maintenant mettre fin à leurs émissions. 

Deuxièmement, la négligence chronique du Canada a déjà entraîné de graves dommages, ce qui signifie que nous avons transformé nos forêts en émetteurs nets. N’oublions pas que les forêts sont nos alliées dans cette lutte contre la crise climatique, mais qu’elles ne peuvent pas être une excuse pour polluer. Nous devons de toute urgence améliorer leur capacité à séquestrer le carbone de nos émissions passées plutôt que d’en permettre de nouvelles.

Que faut-il faire d’ici la prochaine COP? 

Il est temps que les pays riches comme le Canada, qui sont historiquement les plus responsables du pétrin dans lequel nous sommes, fassent amende honorable. Selon le dernier rapport de Carbon Brief, le Canada est le dixième pays le plus pollueur au monde et il se hisse parmi les plus hauts pour ce qui est des émissions par habitant. Les pays du G20 sont responsables de 80 % des émissions totales aujourd’hui.

Cela étant dit, il faut réduire les émissions à la source et donner un coup de pouce à la nature pour qu’elle puisse se rétablir. Nous devons améliorer notre biodiversité et notre intégrité écologique afin qu’elles puissent redevenir des puits de carbone, tout en respectant le fait que la nature – et les terres autochtones – ne sont pas seulement une solution en termes d’élimination et de stockage du carbone. 

Nous devons assumer notre responsabilité quant aux dommages déjà causés et cesser de nous attendre à ce que la nature en subisse les conséquences.

La COP27 aura lieu l’année prochaine en Égypte. Mais ce n’est pas une raison pour attendre sa venue en nous tournant les pouces. Au contraire, nous devons continuer à nous mobiliser et créer d’urgence un mouvement irrépressible qui saura enfin mettre fin à l’ère des combustibles fossiles.