Kanahus (D) and Mayuk (G) Manuel, Tiny House Warriors, avec Melina Laboucan-Massimo, Lubicon Solar (C) La robe rouge en l'honneur des femmes et des filles autochtones disparues et assassinées.
Kanahus (D) and Mayuk (G) Manuel, Tiny House Warriors, avec Melina Laboucan-Massimo, Lubicon Solar (C) La robe rouge – en l’honneur des femmes et des filles autochtones disparues et assassinées.

Il y a un an, le rapport de l’Enquête nationale sur les femmes et les filles autochtones disparues et assassinées (ENFFADA) prodiguait au gouvernement non pas des recommandations, mais des impératifs légaux incluant des mesures à prendre dans les plus brefs délais afin d’endiguer les violences faites aux femmes, aux filles et aux personnes 2ELGBTQQIA autochtones, Métisses et Inuites. 

Les milliers d’histoires rassemblées qui ont donné vie au rapport ont souligné que les actes de violence, contemporains et coloniaux, contre les populations autochtones constituent un génocide fondé sur le racisme.

« L’État canadien a privé les femmes et les personnes 2ELGBTQQIA autochtones de leurs rôles traditionnels en matière de gouvernance et de leadership, et il continue de violer leurs droits politiques. Cette situation découle d’efforts concertés visant à détruire les systèmes de gouvernance autochtones et à les remplacer par des modèles de gouvernance coloniaux et patriarcaux », note le rapport.

Ces attaques envers les femmes autochtones, ne sont pas seulement un lointain héritage: elles sont encore profondément ancrées dans le système canadien, reproduisant ainsi des modèles d’oppression.

Où en sommes-nous aujourd’hui?


Le plan d’action du gouvernement fédéral, devant être basé sur le rapport de l’ENFFADA, était supposé proposer des mesures concrètes pour remédier à ces discriminations et à ces violences systémiques. Le rapport est sorti il y a un an de cela… où en sommes nous aujourd’hui? 

Alors qu’il faisait plein de promesses il y a un an, le gouvernement fédéral annonçait il y a quelques jours le report du plan d’action en raison de la COVID-19. Une décision annoncée quelques jours seulement avant que des manifestations nationales, dénonçant la mort de personnes noires non armées aux mains de la police, ne l’obligent à admettre que le Canada doit en faire davantage pour lutter contre le racisme systémique. 

Alors il nous dit quoi en fait? Il faut en faire plus, ou ça peut attendre après COVID?

La pandémie COVID-19 n’est pas une excuse pour laisser passer le racisme. Selon une étude faite par l’Association des femmes autochtones du Canada, les femmes autochtones ont signalé davantage de violences pendant la période de confinement. En mai 2020, 17 % d’entre elles ont déclaré avoir subi des violences (physiques ou psychologiques) au cours des trois derniers mois, contre 10 % en 2014 qui avaient déclaré avoir subi des violences au cours des cinq dernières années.  Cette récente étude est une preuve de plus que les femmes autochtones ont besoin d’actions immédiates pour contrer la violence à leur égard. 

Pourtant, nous sommes là, toujours sans plan d’action, et un contexte encore plus inquiétant.

« L’excuse que la pandémie a empêché ou retardé la publication d’un plan d’action national qui commencerait à répondre aux 231 Appels à la justice ne tient tout simplement pas la route », a dit Marion Buller, la commissaire en chef de l’Enquête. 

Lorraine Whitman, présidente de l’Association des femmes autochtones du Canada, a également exprimé sa frustration, en déclarant qu’Ottawa a «eu neuf mois avant que la pandémie frappe pour nous tendre la main, à nous et à d’autres groupes autochtones. Mais je peux vous dire que l’AFAC n’a pas entendu grand-chose venant d’eux pendant ce temps. Dire que la pandémie fait obstacle au plan d’action national est doublement insultant pour les femmes autochtones qui vivent dans une crainte encore plus grande de la violence à cause de l’isolement dû à la maladie.»

Les recommandations du rapport de l’Enquête nationale sont présentées comme des appels à la justice. Vous pouvez les lire ici (à partir de la page 70). Le rapport de l’ENFFADA a permis, grâce aux témoignages des familles des femmes assassinées et disparues, d’amener à l’attention du gouvernement quatre champs d’actions primordiaux: le droit à la culture, le droit à la santé, le droit à la sécurité et le droit à la justice. Parmi ces champs d’action, s’inscrivent des impératifs tels que: la nécessité de corriger les taux disproportionnés de pauvreté chez les femmes autochtones; l’importance d’augmenter l’accès à des habitations sécuritaire; le besoin d’offrir aux femmes autochtones des soins de santé; l’obligation d’intensifier la réactivité, la transparence et l’obligation de rendre des comptes des services de police, etc. 

Mercredi, L’Association des femmes autochtones du Canada, dans son document de suivi du rapport final, a même attribué la “mention d’échec” au gouvernement pour l’ensemble de ces quatres catégories. Il n’en reste pas moins que ces quatre volets sont toujours jugés commes des champs d’actions indispensables et prioritaires par les familles et mouvements de femmes autochtones, afin de mettre fin aux violences faites aux femmes autochtones, métisses et inuites au Canada. 

La violence contre la terre est une violence contre les femmes

La vérité est que la colonisation n’est pas terminée : elle continue sous la forme du néocolonialisme. Et l’une des formes que je connais le mieux est l’extraction des ressources.  Qu’est-ce que le néocolonialisme ? C’est l’empiètement continu sur les territoires traditionnels par l’extraction et l’exploitation des ressources. 

Traduction, Melina Laboucan-Massimo, Source

Nous n’allons pas laisser le vieux “boys club” et les riches du monde entier continuer à contrôler et à détruire la planète … Aujourd’hui, nous voyons un mouvement se construire dans les communautés autochtones,  les femmes qui se lèvent… Les femmes autochtones ont commencé le processus de guérison de la violence du colonialisme. C’est grâce à cette guérison que les femmes ont trouvé leur voix pour se dresser contre nos oppresseurs, contre l’État et les industries extractives. 

Traduction, Kanahus Manuel, Source

Les femmes autochtones nous ont dit que la violence contre la terre, sous la forme d’extraction de ressources, est liée à la violence contre les femmes

En fait, le rapport de l’Enquête nationale s’est attardé à ces problèmes et en appelle à la justice: « Nous demandons aux gouvernements fédéral, provinciaux et territoriaux de financer des enquêtes et des recherches supplémentaires afin de mieux comprendre le lien entre l’extraction des ressources, et d’autres projets d’exploitation, et la violence contre les femmes, les filles et les personnes 2ELGBTQQIA autochtones. »

Si vous participez à la lutte contre la destruction de l’environnement, impliquez-vous aussi dans le soutien aux femmes autochtones. Dites au Premier ministre Trudeau de faire avancer d’urgence le plan d’action national. Lisez, apprenez, agissez.