La semaine dernière, en discutant avec une bonne amie qui fait du bénévolat auprès de personnes vivant temporairement dans un aréna, mon cœur s’est brisé. J’ai été confrontée au fait que la crise de la COVID-19 avait touché plus durement certaines personnes. «Beaucoup de personnes avec lesquelles je travaille sont des voyageurs et voyageuses qui ne peuvent tout simplement pas rentrer dans leur pays. Mais certain·es sont de nouvelles et nouveaux pauvres…» a-t-elle affirmé avant de prendre une pause, «de nouvelles et nouveaux sans-abris» a-t-elle expliqué. Mes pensées se sont tournées vers toutes ces familles qui peuvent généralement joindre les deux bouts, mais qui n’ont pas de coussin pour faire face aux imprévus. 

J’ai alors allumé la radio, Radio Canada pour être exacte, et le journaliste expliquait comment un certain nombre d’entreprises avaient accru leur richesse pendant cette pandémie. Prenons un moment pour absorber la nouvelle. Alors que mon amie donne un coup de main à des gens qui ont presque tout perdu, les empires que sont Facebook, Netflix, Amazon se développent… et les PDG (et malheureusement trop peu souvent leurs employé·es) s’enrichissent. Ces dernières années, des organisations comme Oxfam ont d’ailleurs publié de nombreux ouvrages sur le fossé grandissant entre les riches et les pauvres[1]. Il est juste de dire que la crise à laquelle nous sommes confronté·es présentement exacerbe l’ironie et les inégalités de notre système économique mondial. 

Impôt sur la fortune: quelques statistiques

Alors que la COVID-19 sévit et se répand, un nouveau rapport de l’Institute for Policy Studies [2] dévoile que la richesse des milliardaires américain·es, elle, a augmenté de près de 10 % en trois semaines seulement. En fait, Jeff Bezos, fondateur et directeur général d’Amazon, ainsi que Mark Zuckerberg, directeur général de Facebook, en sont jusqu’à présent les plus grands gagnants. Ils ont vu leur richesse combinée augmenter de 63 milliards de dollars depuis le 18 mars[3].

De notre côté de la frontière, alors que la moitié des Canadien·nes s’en sortent à peine, un rapport publié en 2018 a révélé que 87 familles possèdent plus de 259 milliards de dollars. Ceci représente plus de la moitié de la richesse du pays [4]. Oui oui, vous avez bien lu: elles possèdent la moitié de toutes les richesses du Canada! 

Pouvons-nous nous permettre de continuer à faire comme si de rien n’était, alors que les gens très riches s’enrichissent et que le reste d’entre nous sommes sur le point d’être écrasé·es par une crise économique mondiale, possiblement, oserais-je dire, sans précédent? 

Au début, ma réaction fut instinctive: “Ce n’est pas juste, les riches devraient payer pour la reprise économique.” Puis, la responsable de l’équipe numérique chez Greenpeace en moi a pris le dessus. Je me suis mise à penser à tous les changements positifs que notre gouvernement pourrait apporter grâce à une relance véritablement verte. Nous pourrions orienter notre économie en investissant dans les énergies renouvelables plutôt que dans le pétrole sale, réellement mettre en œuvre les droits des travailleuses et des travailleurs, un système de soin de santé, les droits autochtones, etc, etc… En tant qu’ancienne employée d’Oxfam, mes pensées se sont également tournées vers le système fiscal : évasion fiscale légale, favoritisme des entreprises… les règles du jeu encouragent une croissance économique infinie et sont conçues pour ne profiter qu’à une minorité. 

Comment pouvons-nous assurer une relance juste et verte? Quel pourrait être le rôle d’une taxe sur la richesse?

Alors que je me pose cette question, j’ouvre ma boîte courriel personnelle (pensant à tou·tes ces milliardaires et leur richesse en cliquant), pour trouver un courriel de Leadnow, abordant cette même question. L’organisation a précisé lors d’une action qu’elle a récemment lancée: «sans une fiscalité juste et équitable, ces fortunes continuent de monter en flèche alors que nos salaires stagnent, que nos emplois disparaissent et que nos services publics s’effritent»[5]. Avec le récent ralentissement drastique de notre économie mondiale, c’est peut-être exactement vers cela que nous nous dirigeons. 

Avec la crise sanitaire tragique à laquelle nous sommes confronté·es, nous avons peut-être une occasion unique de redresser notre système économique. Je ne pense pas seulement à une aide temporaire pour les populations vulnérables ici, je pense à un changement systémique. 

Un récent sondage a révélé que les Canadien·nes soutiennent massivement un impôt sur la richesse des multimillionnaires, afin d’aider à financer la relance suite à la COVID et à réduire les inégalités croissantes[6]. En regardant les chiffres et le monde qui nous entoure, pouvons-nous nous permettre de ne pas prendre des mesures immédiates et urgentes pour lutter contre les inégalités de revenus ?

Qu’en pensez-vous ? Alors que notre gouvernement reconstruit nos politiques et notre économie pour faire face à une crise sans précédent, nous pouvons mieux reconstruire. Devrions-nous rendre notre système fiscal plus équitable, au lieu de le maintenir tel qu’il est, injuste et truqué, pour continuer de rendre les riches plus riches ?

[1]https://www.reuters.com/article/us-davos-meeting-inequality/gap-between-rich-and-poor-growing-fuelling-global-anger-oxfam-idUSKCN1PF00P

[2]https://ips-dc.org/billionaire-bonanza-2020/

[3]https://markets.businessinsider.com/news/stocks/us-billionaires-add-485-billion-net-worth-during-pandemic-report-2020-5-1029263947

[4]https://www.theguardian.com/world/2018/jul/31/canada-richest-families-same-wealth-12-million-people-report

[5]https://act.leadnow.ca/wealth-tax-super-rich/
[6]https://ricochet.media/en/3143/canadas-top-billionaires-are-getting-richer-thanks-to-covid-19-and-donating-a-pittance