Nouvellement maman, tout mon être était alerte au moindre bruit qui sortait de mon petit bout de chou. Il ne m’a pas fallu une pandémie mondiale pour forcer tous nos invités à se laver les mains dès qu’ils et elles franchissaient la porte. Pour quelqu’un qui se rongeait les ongles incessamment et suivait la règle du “cinq secondes”, je n’aurais jamais cru que je serais un jour si anxieuse de la propreté des mains d’autrui… Tu as flatté le chien? Lave-toi les mains! Tu as attaché tes chaussures? Tu t’es gratté le nez? Tu as fait des courses? Lave-toi les mains!! Je regardais mes ami·es, méfiante, qui se transformaient sous mes yeux en microbe géant. Dr Google est devenu mon meilleur, et mon pire, ami.

Je ne pouvais m’en empêcher. Tenant mon fils pour la première fois, j’ai ressenti cet amour puissant, incontrôlable, mais aussi, une responsabilité écrasante de protéger cet être si fragile. L’instinct maternel. Mais ce ne sont pas seulement les microbes, ses étranges selles vertes ou les tétées aux deux heures qui me tiennent éveillés la nuit.

C’est la qualité de l’air qu’il respire et de l’eau qu’il boit. C’est la perspective d’une extinction massive, de mauvaises récoltes et de sécheresses, de bouleversements sociétaux en raison des vagues de chaleur et de la montée des océans qui rendent certaines zones inhabitables. Je pourrais continuer, la liste est longue. Tard la nuit, mon esprit s’emballe. Le matin, des alertes au smog que j’ignorais auparavant influencent maintenant mes sorties.

J’essaie d’imaginer l’avenir, son avenir. Selon les scientifiques, il ne nous reste que dix ans pour agir, pour «réparer» les dommages que nous avons fait, et pour réduire drastiquement nos émissions. Pourtant, je ne vois que des gestes symboliques, sans impact. Ou pire encore : l’inverse. Financer des pipelines? Vraiment?! Mon éco-anxiété est passée à la vitesse supérieure. J’avais du mal à garder espoir.

Et puis, la COVID-19 à fait son arrivée. Elle chamboule nos vies, nos emplois, l’économie, et j’en passe. Tout est sur pause. Curieusement, aussi terrible et dévastatrice que cette pandémie est, cette crise ouvre la porte à l’univers des possibles. Au cours de cette pandémie, nos gouvernements ont réagi et ont mis en place des mesures importantes pour faire face à cette crise, mesures qu’aucun politicien n’oserait adopter en temps “normal”.

 À travers la peur et l’angoisse, je vois des défis mais aussi des possibilités, je vois de l’espoir. Je vois du changement.. Je vois du courage et de la force. Je recommence à y croire. 

Ce printemps, en tant que société, nous avons pris des actions collectives nous permettant de se protéger. En travaillant ensemble, nous avons pu sauver des vies et protéger les plus vulnérables. Nos choix en tant que société ont eu un grand impact et vont façonner notre avenir collectif.

Mais cette pandémie n’est pas la seule menace mondiale à laquelle nous sommes confronté·es. En tant que société, c’est également de notre responsabilité de saisir ce moment pour mieux faire face à une grande crise existentielle:  la crise climatique. La crise de la COVID-19 nous donne l’occasion de s’attaquer aux inégalités sociales et aux problèmes environnementaux. De réévaluer notre style de vie, nos choix. Les mesures temporaires adoptées pour faire face à cette pandémie doivent maintenant devenir des solutions à long terme pour un avenir juste, un avenir vert.

Malgré le ciel bleu clair de Delhi et les canaux cristallins de Venise, il est clair que le confinement et la fermeture des entreprises ne sont pas une solution viable. Pourtant, revenir à la “normale”, c’est ignorer nos erreurs et foncer tout droit vers le mur. Nous avons l’occasion de nous éloigner d’une structure économique qui détruira notre avenir. Il est temps de mettre en œuvre un changement systémique axé sur des politiques et une économie durables. Qu’attendons-nous?

Cette pandémie nous a démontré que ce sont nos choix en tant que société qui façonnent notre avenir collectif. Individuel et gouvernemental. Mes choix individuels sont certes importants, mais collectivement, ils peuvent être synonyme d’espoir. Cette action collective est aussi celle qui donne du pouvoir aux gens, nous fait sentir que nos actions individuelles comptent, comme elles le font présentement en temps de pandémie. Le moment est donc venu d’utiliser cet élan pour pousser le gouvernement à agir pour la protection de l’environnement. Parce que faire face à la crise environnementale est toujours au cœur des préoccupations individuelles. Nous savons maintenant que nous détenons la force et le courage de mettre en place les mesures nécessaires pour protéger notre bien-être. 

Aujourd’hui, c’est la fête des mères. Ma toute première fête des mères que j’avais très hâte de célébrer d’une manière non traditionnelle. Pas de fleurs, pas de chocolat, pas de brunch. Bébé Nioca attaché à ma poitrine, accompagnée de ma propre mère et sœur, mes nièces, nos partenaires et des milliers d’autres mères, j’étais prête à monter sur la Colline du Parlement pour exiger des changements. Des changements pour assurer une vie remplie de câlins pour mon fils, et non le port obligatoire d’un masque, une distanciation sociale et souvent émotive. Se couvrir le visage pour ne pas attraper froid en hiver, c’est une chose ; porter un masque car l’air est trop pollué, c’est autre chose. 

Si la COVID-19 a légèrement modifié mes plans, cela ne m’empêchera pas de passer à l’action. Je demande donc, pour la fête des mères, que le gouvernement s’engage à : 

  • Créer un  plan de relance pour les travailleuses et travailleurs de nos communautés – pas pour les dirigeant·es d’entreprise. 
  • Verser des aides financières directement aux personnes impactées par les pertes de revenus.
  • Offrir la gratuité des soins de santé pour toutes et tous.
  • Investir dans le logement et offrir de l’eau potable à toutes les communautés autochtones.
  • Renforcer la résilience des communautés pour prévenir les crises futures.
  • Créer des emplois en investissant dans l’assainissement de l’environnement et la transition énergétique.

Je ne croiserai sûrement pas nos ministres lors de ma promenade quotidienne aujourd’hui. Dommage. Mais si je les croise prochainement, je les implorerai de ne pas se laver les mains de toutes ces préoccupations environnementales. Je vous prie de mettre la main à la pâte, de vous retrousser les manches et de travailler fort vers quelque chose à laquelle on peut croire. Il en va de notre avenir.