(CHARM EL-CHEIKH, EGYPTE) La COP27 à Charm el-Cheikh s’est terminée par la création historique d’un fonds des Nations Unies en réponse aux pertes et dommages amplifiés par la crise climatique, s’attaquant directement aux conséquences de l’inaction climatique et de l’expansion des combustibles fossiles. Le Réseau action climat Canada se joint aux communautés du Sud, aux États insulaires et à la société civile du monde entier pour célébrer cet accord mondial après une lutte de trente ans.

Cette décision est le reflet même de la justice climatique, l’espoir que les pollueurs de la planète seront amenés à payer pour les souffrances qu’ils infligent sur les personnes qui se retrouvent en première ligne de la crise climatique et qui pourront bénéficier d’un soutien pour se reconstruire et se rétablir.

Le Canada – un grand émetteur historique – a joué un rôle important en offrant un soutien très tôt à l’appel des nations vulnérables au climat.  Il doit maintenant étendre ce soutien en engageant des fonds et en veillant à ce que la mise en place du fonds soit dirigée par les pays les plus vulnérables et réponde à leurs besoins.

Nous sommes dans un combat pour notre survie. Lors de la COP27, les intérêts des pollueurs ont inondé les salles de négociation et bloqué toute avancée sur la cause de la crise climatique – les combustibles fossiles. La COP27 se termine par une déclaration qui ne mentionne pas l’élimination progressive des combustibles fossiles. Mais, nous sommes témoins d’un consensus croissant sur le fait qu’un processus climatique qui ne s’attaque pas aux combustibles fossiles est un processus détourné qui ne protège pas les personnes et les communautés du monde entier.

Au Canada, garder l’objectif de limiter le réchauffement planétaire à 1,5°C en vie signifie éliminer les énergies fossiles de notre réseau électrique, de nos voitures, de nos maisons et de nos bâtiments. Pour ce faire, il faudra mettre en œuvre avec ambition et rigueur les politiques climatiques tout en évitant de céder sous la pression de l’industrie.

Cette COP a attiré l’attention internationale sur les liens entre les droits de la personne et la justice climatique. La clôture de la COP27 ne doit pas signifier que les projecteurs s’éteignent sur les droits humains et la nécessité de libérer tous les prisonnier.e.s de conscience. Le Réseau action climat Canada continuera d’être solidaire des défenseur.euse.s des droits humains et de réclamer un espace civique ouvert partout.

Points saillants des résultats de la COP27 :

  • Ici à la COP27, les pays ont fait des progrès en matière de financement. Il ne peut y avoir d’augmentation de l’ambition sans une augmentation des flux financiers qui s’alignent sur un avenir compatible avec une augmentation de la température planétaire limitée à 1,5°C. Cette COP a vu le lancement du dialogue de Sharm el-Sheikh sur l’article 2.1c. Grâce à ces travaux, les gouvernements doivent commencer à rediriger les flux financiers des subventions qui sont actuellement octroyées aux combustibles fossiles. 
  • Nous sommes témoins d’un ralentissement du progrès en matière d’atténuation, avec un accord qui ouvre la porte à des échappatoires pour l’expansion du gaz, malgré la nécessité évidente et urgente de réduire plus rapidement et plus profondément les émissions. Si l’on veut que l’objectif de 1,5°C reste à portée de main, le Canada doit en faire davantage. Nous appelons le Canada à utiliser le programme de travail sur l’atténuation comme une opportunité pour renforcer son action nationale et sa contribution déterminée au niveau national, comme le demande le Pacte de Glasgow.
  • Assurer la mise en oeuvre des politiques d’adaptation transformationnelles sauve des vies. Mais l’adaptation reçoit une attention et un financement inadéquats. Le plan de mise en œuvre de Charm el-Cheikh réitère l’engagement pris à Glasgow pour que les pays riches doublent le financement pour l’adaptation ; le Canada doit suivre la mouvance et s’engager à porter le financement pour l’adaptation à 50 % de l’ensemble du financement climatique.
  • La COP27 a également donné lieu à la création d’un programme de travail sur la transition juste et a mis l’accent sur la nécessité du dialogue social – une étape importante qui est le résultat du travail acharné du mouvement syndical. Il faudra veiller à ce que la transition juste reste centrée sur les droits des travailleur.euse.s, et ne soit pas diluée ou utilisée comme prétexte pour promouvoir des fausses solutions.
  • Le texte de la décision ne fait pas mention de la Convention sur la diversité biologique (COP15) qui se tiendra à Montréal en décembre prochain et qui vise à établir un programme ambitieux de protection de la nature pour la prochaine décennie.
  • Les droits des Autochtones sont mis en avant dans le contexte de l’objectif global d’adaptation, mais doivent être pris en compte dans toutes les décisions prises dans le cadre de la CCNUCC, car la souveraineté et les terres des autochtones continuent d’être menacées par ceux qui encouragent l’expansion des combustibles fossiles et l’utilisation de faux crédits carbone sous l’article 6.

Citations:

Eddy Pérez, Directeur de la diplomatie climatique internationale, Climate Action Network – Réseau action climat Canada:

« Ce moment témoigne du pouvoir de la société civile et des pays du Sud. Face aux impacts climatiques terrifiants et aux tactiques de délais des pays riches, nous avons été témoins de la force de notre action collective. La justice climatique ne sera possible que si nous expulsons les pollueurs de tous nos espaces de politiques climatiques et de prise de décision afin qu’ils ne puissent plus freiner notre mouvement vers un avenir sécuritaire et sans énergies fossiles. » 

Patrick Rondeau, conseiller à l’Environnement et transition juste, Fédération des travailleurs et travailleuses du Québec:

« Ce à quoi nous assistons aujourd’hui est la reconnaissance de la responsabilité historique des pays développés. Mais nous ne pouvons nous en satisfaire, il reste beaucoup de chemin à faire. En ce moment, la crise climatique met en danger la vie de travailleurs et travailleuses et leur mode de vie. Elle affecte leur santé physique et mentale, plaçant les travailleuses et travailleurs dans des positions difficiles et poussant certains à émigrer. Nous avons besoin de plus, nous avons besoin d’une transition juste, maintenant! »

Émile Boisseau-Bouvier, analyste des politiques climatiques chez Équiterre:

« Un plafond de verre vient d’être brisé en matière de justice climatique à la COP27 avec l’accord rapide pour la mise en place d’un fonds pour les pertes et préjudices, un enjeu qui s’est enfin ajouté à l’agenda des négociations grâce à la mobilisation des pays du Sud et de la société civile depuis des décennies. Cette percée – inattendue mais plus que bienvenue – demeure néanmoins assombrie par l’influence des lobbyistes pétro-gaziers qui ont encore une fois réussi à éviter qu’on nomme le vrai problème dans la décision finale : toutes les énergies fossiles. Équiterre déplore particulièrement le manque d’engagement et de leadership du Canada sur cette question. »

Julie Segal, gestionnaire principale du financement climatique, Environmental Defence Canada:

« Après trente ans, le Canada et tous les pays du monde ont enfin reconnu que les pays riches doivent payer pour les pertes et les dommages causés par les catastrophes climatiques résultant de nos décennies d’émissions de carbone. Le traitement des pertes et des dommages est un événement historique, et ce grâce à l’unité résolue des courageux militants et défenseurs des pays les plus vulnérables. Nous avons également constaté le début d’un consensus à cette COP sur la nécessité de réformer le système financier privé en fonction de la sécurité climatique, et nous suivrons attentivement les mesures prises par le Canada à ce sujet chez nous. Pourtant, malgré les preuves que l’argent doit sortir des problèmes pour entrer dans les solutions, les pays riches n’ont pas agi en fonction de la science, qui montre que retarder l’élimination progressive des combustibles fossiles aggravera les catastrophes climatiques futures. »

Patrick Bonin, responsable de la campagne Climat-Énergie, Greenpeace Canada:

« Encore une fois, le Canada a davantage écouté les lobbys pétroliers et gaziers que les voix des populations, en particulier celles les plus impactées, qui exigent des actions à la hauteur de la crise climatique. Malgré une contribution positive pour l’établissement d’un Fonds pour les pertes et dommages, le Canada n’a pas proposé une cible plus ambitieuse ou de nouvelles mesures significatives pour accélérer la réduction de ses GES et n’a pas augmenté substantiellement son financement pour aider les pays en développement à réduire leurs émissions et s’adapter aux évènements climatiques extrêmes. Malheureusement, le gouvernement Trudeau n’a pas été à la hauteur de la crise climatique. »

Albert Lalonde, militant-e étudiant-e pour la justice climatique et chargé-e de projet à la Fondation David Suzuki

« Le refus actif du Canada de sortir des énergies fossiles est une grossière insulte au bon sens et une attaque à l’équilibre planétaire. Après des décennies à éviter la question des pertes et préjudices malgré le militantisme fort des sociétés civiles des pays les plus affectés, la création d’un fond marque une étape historique. Énormément de travail doit encore être accompli pour ne pas abandonner les pays les plus vulnérables face à la dévastation entraînée par une crise qu’ils n’ont pas causée et aucune cohérence n’est possible sans mesures drastiques d’atténuation des changements climatiques. »

Radia Mbengue, Coordinatrice du Partenariat Mondial : Afrique et justice climatique, KAIROS CANADA

« La création d’un fonds pour les pertes et dommages est un premier pas vers la décolonisation de l’action climatique. Nous devons nous assurer que ces fonds soient réellement accessibles aux plus vulnérables et que les pays développés, y compris le Canada, soient tenus responsables de l’impact de leurs entreprises d’extraction de ressources dans le monde, en particulier sur les communautés racialisées. Ceci représente la poursuite de la colonisation de nos terres. Notre combat pour la justice environnementale doit être un combat pour la justice raciale. Le financement ne suffit pas face à l’injustice, la violence et l’impunité. »

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Laura Bergamo, conseillère aux communications, Greenpeace Canada

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