Un projet de gaz naturel liquéfié (GNL) en Nouvelle-Écosse suscite des inquiétudes sur le plan juridique et environnemental

Halifax (Terres non cédées des Mi’kmaq) – Huit groupes environnementaux d’envergure au Canada somment le ministre fédéral de l’Environnement et du Changement climatique, Jonathan Wilkinson, ainsi que l’Agence d’évaluation d’impact du Canada de veiller à ce que le projet proposé d’exportation de gaz naturel liquéfié Goldboro (GNL Goldboro) de Pieridae Energy fasse l’objet d’une évaluation d’impact fédérale complète et à jour. 

Pieridae Energy cherche présentement à obtenir un soutien financier de près d’un milliard de dollars de la part du gouvernement fédéral – et donc des contribuables – pour y aller de l’avant avec le projet.

Les avocats d’Ecojustice ont envoyé lundi une lettre au nom des huit groupes au ministre et à l’Agence à cet effet, les enjoignant d’y répondre dans les 90 jours.

Les impacts climatiques du projet n’ont pas encore fait l’objet d’une surveillance fédérale. Selon des experts indépendants, GNL Goldboro devrait faire augmenter à lui seul de 18 % le niveau actuel des émissions de gaz à effet de serre (GES) en Nouvelle-Écosse et faire en sorte que cette dernière dépasse d’un tiers son plafond d’émissions provincial pour 2030. 

Les émissions potentielles de GES découlant du projet pourraient sérieusement entraver la capacité des gouvernements de la Nouvelle-Écosse et du Canada à respecter leurs engagements en matière de changement climatique, surtout dans un contexte où les objectifs du Canada en matière de réduction des émissions de GES pour 2030 ont été revus à la hausse et que ceux pour 2050 seront bientôt légiférés.

Le projet GNL Goldboro a fait l’objet d’une évaluation environnementale provinciale et a été approuvé en 2014. L’Agence canadienne d’évaluation environnementale (le précurseur de l’Agence actuelle) a décidé en 2012 qu’un examen environnemental fédéral du projet n’était pas justifié, et a préféré s’en remettre à une évaluation fédérale antérieure de 2007 pour un projet très différent sur le même site. Cependant, les groupes environnementaux soutiennent que l’Agence n’avait pas l’autorité statutaire de prendre cette décision et que, par conséquent, la mise en œuvre du projet sans évaluation fédérale appropriée a conduit à une situation illégale qui perdure.

La construction d’une nouvelle installation de gaz naturel liquéfié, telle que celle proposée pour Goldboro, est expressément désignée comme une activité en vertu du Règlement sur les activités concrètes, conformément à la Loi sur l’évaluation d’impact du fédéral. En tant qu’activité désignée, les groupes affirment que GNL Goldboro ne peut légalement aller de l’avant sans une évaluation d’impact fédérale qui doit tenir compte de la science climatique récente, des engagements de réduction des émissions de GES et des risques économiques des projets de GNL qui ont énormément évolués depuis 2007.

La lettre a été envoyée par Ecojustice au nom d’un groupe formé du Ecology Action Centre, de la Nova Scotia Fracking Resource and Action Coalition, de l’Alliance anti-gaz de schiste du Nouveau-Brunswick, de la Sierra Club Canada Foundation, du Conseil des Canadiens, d’Environnement Vert Plus, du Citizens’ Oil & Gas Council et de Greenpeace Canada. Les mandats de ces groupes couvrent la Nouvelle-Écosse, le Nouveau-Brunswick, le Québec, l’Alberta ainsi que l’ensemble du Canada.

James Gunvaldsen Klaassen, avocat chez Ecojustice, a dit :

« Le gouvernement fédéral doit évaluer le projet proposé de GNL Goldboro conformément à la Loi sur l’évaluation d’impact. Sans cette évaluation légale, nos clients craignent que les Canadien·ne·s ne puissent pas avoir une image claire de l’impact potentiel du projet sur notre environnement et nos engagements climatiques.

La décision antérieure et illégale de l’Agence d’utiliser l’évaluation d’un ancien projet distinct n’est pas une solution appropriée pour satisfaire aux exigences en matière d’évaluation d’impact pour ce nouveau projet.

Il y a eu des avancées importantes au niveau de la science et des engagements climatiques qui doivent être pris en compte par l’AEI. »

Pascal Bergeron, porte-parole d’Environnement Vert Plus, a dit :

« Lors de sa fusion avec la pétrolière junior locale Pétrolia opérant dans la région du Gaspé et sur l’Île Anticosti en 2017, Pieridae a promis de développer une grande partie du territoire gaspésien afin d’alimenter son terminal de liquéfaction. Notre région maritime, dont l’économie est basée sur la beauté de la terre et la pureté de son eau, deviendrait une région dominée par l’industrie fossile. 

Maintenant que Pieridae a annoncé qu’elle allait liquider ses actifs dans notre région, son terminal de liquéfaction demeure une véritable aberration environnementale soutenue par un gigantesque gaspillage de fonds publics. L’évaluation environnementale fédérale bâclée doit être rouverte afin de pouvoir évaluer les véritables impacts du projet et éviter les investissements publics. Une véritable évaluation environnementale pourrait mettre terme à ce cauchemar. »

Patrick Bonin, responsable campagne climat-énergie chez Greenpeace Canada, a dit :

« Le projet Goldboro est semblable au projet GNL Québec, qui a déjà été rejeté pour des raisons environnementales par l’agence gouvernementale chargée du dossier. Le gouvernement fédéral perdra toute crédibilité climatique s’il donne le feu vert à Goldboro pour construire une nouvelle installation qui contribuera à la crise climatique et qui va complètement à l’encontre de la relance juste et verte réclamée par les Canadien·ne·s. »

Gurprasad Gurumurthy, coordinateur Énergie, Énergies renouvelables et électricité, Ecology Action Centre, a dit : 

« Nous sommes en pleine urgence climatique et la Nouvelle-Écosse doit abandonner les combustibles fossiles immédiatement. La Nouvelle-Écosse a travaillé dur afin de réduire ses émissions de gaz à effet de serre et l’approbation du projet Goldboro LNG ajouterait 3,7 millions de tonnes d’émissions par an, faisant en sorte que les efforts effectués par la province depuis 5 ans auraient été en vain.

Nous devons trouver une façon d’atteindre un niveau inférieur de 53 % aux émissions de 2005, et non pas aller à l’encontre de ces efforts. »  

Jim Emberger, porte-parole de l’Alliance anti-gaz de schiste du Nouveau-Brunswick, a dit : 

« L’Alliance anti-gaz de schiste du Nouveau-Brunswick est récemment intervenue du côté du gouvernement fédéral auprès de deux cours d’appel et la Cour suprême du Canada concernant l’enjeu de la tarification du carbone. Il serait très inquiétant de voir ce même gouvernement fédéral anéantir les progrès réalisés en matière de climat grâce à sa victoire devant la Cour suprême en autorisant la mise en œuvre du projet néfaste pour le climat de GNL Goldboro sans qu’une évaluation environnementale soit menée, et peut-être même aller jusqu’à financer ce dernier. Si l’un de ces scénarios se produit, on se souviendra de cette hypocrisie et de ces promesses non tenues. »

Ken Summers, porte-parole de la Nova Scotia Fracking Resource and Action Coalition, a dit :

« Le projet GNL Goldboro éliminerait à lui seul les réductions d’émissions de GES de la Nouvelle-Écosse. Le premier ministre Rankin et d’autres promoteurs colportent l’illusion que ce projet serait bénéfique pour l’Allemagne car la combustion du gaz émet moins de carbone que celle du charbon. Cependant, le carbone libéré lors de la liquéfaction et du transport du GNL le rend pareil comme le charbon, c’est-à-dire un autre combustible fossile extra sale. »

Tynette Deveaux, coordonnatrice des communications du chapitre Atlantique de la Fondation Sierra Club Canada, a dit :

« Le gouvernement du Canada affirme s’être « engagé à mener à bien la réconciliation avec les peuples autochtones au moyen d’une relation renouvelée de nation à nation, de gouvernement à gouvernement et entre la Couronne et les Inuits, axée sur la reconnaissance des droits, le respect, la coopération et le partenariat en tant que fondement d’un changement transformateur. » Ainsi, comment est-il possible qu’il permette à Pieridae Energy de mettre en œuvre le plus grand projet de l’histoire de la Nouvelle-Écosse sur le territoire Mi’kma’ki non cédé sans la consultation adéquate du peuple Mi’kmaq? 

De nombreux Mi’kmaq viennent tout juste d’apprendre l’existence du projet LNG Goldboro de Pieridae et de la construction proposée d’un camp de travail destiné à accueillir 5 000 travailleurs issus de l’extérieur de la région. Les femmes Mi’kmaq, y compris les Grassroots Grandmothers, s’opposent à ce projet de GNL et à ce « camp de travailleurs ». Elles invoquent les conclusions de l’Enquête nationale sur les femmes autochtones disparues et assassinées et demandent à tous les paliers de gouvernement d’empêcher la construction de ce camp qui menace leur sécurité et de mettre un terme à ce projet de GNL environnementalement destructeur sur leurs terres. Les femmes Mi’kmaq n’ont pas été consultées et elles n’ont pas donné leur consentement. La Sierra Club Canada est solidaire de ses allié·e·s Mi’kmaq. »

Angela Giles, organisatrice régionale de l’Atlantique au Conseil des Canadiens, a dit :

« Cette entreprise fait pression sur les membres du gouvernement fédéral pour qu’ils appuient le projet de GNL Goldboro et leur demande près d’un milliard de dollars en financement. Le gouvernement fédéral a l’obligation, en vertu de la Loi sur l’évaluation d’impact, d’assurer un processus d’approbation complet et transparent, y compris en assurant la tenue de consultations publiques.

 Nous partageons les inquiétudes importantes des grands-mères Mi’kmaq quant à la présence d’un camp de travail étant donné l’augmentation bien documentée de la violence de la part des travailleurs de passage qui fréquentent des camps semblables, principalement des hommes, à l’égard des femmes et des filles autochtones. Nous nous faisons également écho à leurs préoccupations en lien à la poursuite de l’extraction de combustibles fossiles, et plus particulièrement le lien avec Alton Gas et la fracturation.»

Contexte :

Pieridae Energy propose de construire une usine de gaz naturel liquéfié nommée GNL Goldboro sur la côte Est de la Nouvelle-Écosse, ce qui représente un projet de 13 milliards de dollars. S’il est construit, ce projet permettra à l’entreprise d’acheminer du gaz naturel de l’Alberta à la Nouvelle-Écosse par le biais de pipelines. Le gaz serait ensuite liquéfié et stocké à l’usine de GNL Goldboro avant d’être envoyé outre-mer en Allemagne, puis dans d’autres pays d’Europe occidentale.

Selon l’expert indépendant Larry Hughes, l’usine de GNL Goldboro anéantirait le plafond d’émissions de la Nouvelle-Écosse, en prévoyant une augmentation annuelle des émissions de gaz à effet de serre de 3,7 mégatonnes. La province a récemment déclaré qu’elle s’engageait à réduire ses émissions afin d’atteindre un niveau inférieur de 53 % à celui des niveaux de 2005 d’ici 2030, mais ce projet fera en sorte que la Nouvelle-Écosse dépassera ce plafond d’émissions d’environ 33 %. Pour la même période et le même niveau de référence, le gouvernement fédéral a récemment annoncé qu’il avait revu ses objectifs à la hausse et qu’il s’engageait maintenant à atteindre un niveau inférieur de 40 à 45 % à celui des niveaux de 2005 d’ici 2030. Les deux juridictions ont exprimé leur engagement à atteindre des émissions nettes nulles d’ici 2050.

Pieridae doit prendre une décision finale concernant la mise en œuvre du projet d’ici la fin du mois de juin. Le porte-parole de l’entreprise a déclaré publiquement qu’elle avait besoin d’une décision du gouvernement fédéral en ce qui concerne le soutien financier d’un milliard de dollars « au cours des deux prochains mois ».

Le 3 mai 2021, Ecojustice a lancé une campagne de sensibilisation en adressant une lettre au ministre Wilkinson et à d’autres ministres fédéraux pour leur demander de rejeter la demande d’aide financière de l’entreprise. La lettre précise que le fait d’octroyer une aide financière à ce projet menacerait les objectifs climatiques provinciaux et nationaux, ainsi que l’engagement des deux juridictions à atteindre des émissions nettes nulles d’ici 2050. À ce jour, plus de 2 800 Canadien·ne·s ont participé à cette action. 

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Veuillez trouver la lettre envoyée au ministre et à l’Agence au nom des huit groupes ici.

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