Les profondeurs océaniques regorgent de merveilles naturelles. Il s’agit d’un monde unique et encore largement méconnu. Mais ce territoire aussi gigantesque que mystérieux est menacé par une nouvelle industrie controversée : l’exploitation minière en eaux profondes.

Une méduse à crinière de lion, l’une des nombreuses espèces extraordinaires des profondeurs marines.

Une poignée d’entreprises et de pays ont l’intention d’envoyer des machines géantes dans les profondeurs marines. Leur motivation ? Extraire des métaux et des minéraux, en espérant faire un maximum de profits. Dans leur viseur, les nodules de manganèse qui se trouvent au fond de la mer. Ces formations rocheuses vieilles de plusieurs millions d’années contiennent du nickel, du cobalt, du cuivre et du manganèse précieux. Les monstrueuses machines utilisées par cette industrie risquent de causer des dommages irréversibles à des habitats sensibles et uniques. 

Jusqu’ici, les permis octroyés ne concernaient que des pratiques exploratoires d’exploitation minière en eaux profondes. Ces tests se déroulent dans une zone large d’un million de kilomètres carrés, et engendrent déjà leur lot de destruction. Mais la bonne nouvelle, c’est que l’exploitation en tant que telle n’a pas encore commencé et que nous pouvons donc encore l’arrêter !

Dans ce blog, nous listons cinq raisons qui nous poussent à penser que l’exploitation minière en eaux profondes ne fera qu’aggraver les problèmes de notre belle planète.

Groupe de sérioles lalandi sur la montagne sous-marine Dom João de Castro, aux Açores.

Raison 1 : cela nuit à la faune et à la flore marines

Le pillage des fonds marins causera des dommages environnementaux inévitables, graves et irréversibles à la vie marine. Ce n’est pas Greenpeace qui l’affirme, mais les scientifiques. Un simple coup d’œil aux dernières recherches menées en la matière suffit à s’en convaincre : ‘Deep-Sea Mining with No Net Loss of Biodiversity – An Impossible Aim’.

Les grands fonds accueillent notamment des montagnes sous-marines, qui constituent des oasis de vie. On y trouve des récifs coralliens et un très grand nombre d’animaux marins, à l’instar de requins qui peuvent vivre des centaines d’années. Les chercheurs estiment que les dommages causés par l’exploitation minière à la faune et à la flore sont « susceptibles de durer éternellement, à l’échelle de temps humaine ».

Et comme si la destruction totale des habitats marins ne suffisait pas, les machines qui creusent les fonds marins alimenteront également des ‘panaches de sédiments’, sortes de nuages de poussière marine, susceptibles d’étouffer toute forme de vie sur des kilomètres. 

Les processus de remise en état et les navires utilisés pour l’exploitation minière peuvent également émettre des toxines dans l’eau, ce qui risque d’endommager de nombreuses espèces océaniques sur des centaines, voire des milliers de kilomètres.


La pollution lumineuse et sonore est également un problème pour la faune. Le bruit des machines peut nuire aux mammifères marins tels que les baleines. L’éclairage de certaines parties les plus obscures de l’océan pourrait enfin perturber de manière permanente les animaux marins qui se sont adaptés à une lumière naturelle très faible.

Le Spirographe ou Sabella Spallanzanii, l’une des nombreuses créatures extraordinaires des profondeurs marines.

Raison 2 : cela menace d’extinction des créatures qui n’existent nulle part ailleurs

Les créatures des grands fonds sont totalement uniques. Belles, étranges et merveilleuses, elles se sont adaptées pour vivre dans un environnement extrême et semblent débarquer tout droit d’une autre planète. On peut par exemple citer les ‘vers zombies’ découverts en 2002 ou des anémones de mer transparentes qui peuvent manger des vers six fois plus gros qu’elles. 

Dans un des endroits convoités par les entreprises d’exploitation minière, 85 % de la faune vit autour de cheminées hydrothermales (ouvertures dans le fond marin d’où sortent de la chaleur et des matières minérales) que l’on ne trouve nulle part ailleurs dans les océans. Il est absolument choquant que des permis d’exploration d’exploitation minière aient déjà été délivrés pour de tels endroits. On pense notamment à l’incroyable Lost City au milieu de l’Atlantique.

Les machines minières broieraient et détruiraient les habitats pour lesquels ces créatures sont spécialement conçues, les menaçant d’extinction. 
En outre, les nodules de manganèse que les sociétés minières convoitent prendront des millions d’années pour se reconstituer. L’état des recherches ne permet pas de savoir si les créatures qui en dépendent survivront à leur extraction.

Méduse scyphozoaire, une des créatures des profondeurs que l’on trouve dans l’Arctique.

Raison 3 : cela affecte nos meilleurs alliés dans la lutte contre la crise climatique

Les grands fonds marins constituent un réservoir gigantesque de « carbone bleu ». Il s’agit du carbone naturellement absorbé par les organismes marins et stocké dans leurs restes – les sédiments des grands fonds – au fond de l’océan, des milliers d’années après leur mort. Ce réservoir contribue à ralentir la crise climatique.

Les machines de l’industrie minière risquent de nous priver de cet allié dans notre combat contre le dérèglement climatique. Pire, si elles venaient à libérer le carbone stocké dans les sédiments des grands fonds, les machines d’exploitation minière en eau profonde pourraient même accélérer la crise climatique.

Alors que la crise climatique nous frappe déjà de plein fouet, voulons nous vraiment nous rendre la tâche encore plus difficile? 

Raison 4 : cela impacte toute la chaîne alimentaire océanique

L’exploitation minière en eaux profondes a également un impact négatif sur l’ensemble de la chaîne alimentaire des océans. Une enquête de Greenpeace a d’ailleurs révélé que les entreprises qui cherchent à investir dans ce secteur sont conscientes de ce risque. Un document distribué lors d’une réunion des parties prenantes de l’exploitation minière en eaux profondes reconnaît « l’extinction possible d’espèces uniques qui constituent le premier maillon de la chaîne alimentaire ».

Méduse flottant juste au-dessus du fond marin, au sud de l’ouverture de l’IMAX dans Lost City, océan Atlantique.

Raison 5 : voulons-nous vraiment détruire ce monde merveilleux avant même de l’avoir découvert ?

Seul 0,0001 % des fonds marins a été étudié jusqu’ici! Nous ne pouvons pas attendre d’entreprises qu’elles gèrent correctement quelque chose que nous ne connaissons pas encore. 

Aucun minéral ou métal ne vaut la peine de détruire des écosystèmes qui n’ont pas encore été découverts. Les entreprises qui utilisent ces matériaux pour les smartphones et les énergies renouvelables devraient investir dans le recyclage et les nouvelles technologies au lieu de menacer la vie marine pour faire du profit.

Extraction de charbon dans la forêt de Hambach. Imaginez une telle machine creusant les fonds marins.

Une évidence : l’exploitation minière en eaux profondes est néfaste pour les océans

Les entreprises qui veulent s’engager dans cette pratique destructrice en connaissent les risques. Elles veulent donc soigneusement éviter tout débat public à ce sujet. 

Cette industrie agit comme les entreprises gazières et pétrolière, qui ont réussi à minimiser pendant des années les dommages causés par leurs activités en parvenant à convaincre les responsables politiques qu’elles étaient essentielles à notre économie. Les sociétés d’exploitation minière en eaux profondes présentent aujourd’hui leur activité comme une « solution verte ». 

Ce n’est pas vrai.

Nous ne devons pas refaire la même erreur. Les enjeux sont énormes. Les crises du climat et de l’effondrement de la biodiversité que nous traversons aujourd’hui sont suffisamment graves. 

Les grands fonds marins constituent le plus grand écosystème de la planète. Nous devrions le protéger et apprendre à le connaître, au lieu de le considérer comme une énième ressource à exploiter sans scrupule.

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