En 2021, le lanceur d’alerte Thomas Goorden a révélé le scandale de pollution aux PFAS de l’usine 3M de Zwijndrecht et du chantier d’Oosterweel tout proche. Depuis lors, des concentrations excessives de PFAS ont également été relevées ailleurs en Belgique. Dès le départ, Greenpeace a apporté son soutien au lanceur d’alerte et aux riverain·es inquiets du collectif citoyen Grondrecht. En août 2021, pour la première fois, l’affaire a été portée en justice. Après deux années de campagne, où en sommes-nous ?

Action au siège de 3M, responsable de la pollution par les PFAS à Zwijndrecht (Anvers). Des militants de Greenpeace Belgique accrochent une banderole sur laquelle on peut lire "Pollueur-payeur"
Action au siège de 3M, responsable de la pollution par les PFAS à Zwijndrecht (Anvers).

Récapitulons les progrès réalisés et les enjeux actuels.

Mars-juin 2021 – Le scandale éclate

En collaboration avec le lanceur d’alerte Thomas Goorden et le collectif citoyen Grondrecht, Greenpeace aide à mettre la pression dans cette affaire. Nous veillons à ce que le pollueur, 3M, soit inquiété. Nous remettons également en question le chantier d’Oosterweel, dénonçant la pollution du sol par des PFAS. Nous exigeons la dépollution rapide de la zone contaminée.

Août 2021 – L’affaire est portée devant le tribunal

En marge de la commission d’enquête parlementaire qui se déroule à cette période, il apparaît clairement que, dans le cadre des travaux d’Oosterweel, le gouvernement flamand et le maître d’ouvrage, Lantis, ont cherché à dissimuler l’impact réel de la pollution aux PFAS qui a été découverte.

Nous demandons d’interrompre les travaux, de réévaluer l’approche adoptée et de garantir une réhabilitation complète des terres contaminées. Cette demande est ignorée. C’est pourquoi nous allons en justice une première fois, avec une demande de suspension des travaux pour raisons environnementales. De cette façon, nous mettons la pression en vue de provoquer un changement de cap.

Décembre 2021 et avril 2022 – Le Conseil d’État sanctionne le gouvernement flamand

Constatant que le maître d’ouvrage, Lantis, persiste et ne change pratiquement rien à son approche, nous portons également l’affaire devant le Conseil d’État, à travers une procédure d’extrême urgence. Celui-ci nous donne raison à deux reprises dans des arrêts intermédiaires. Le mode de fonctionnement du chantier d’Oosterweel est jugé illégal. Le Conseil d’Etat estime que les travaux d’Oosterweel continuent à disséminer des PFAS polluants et que cela constitue une menace pour les riverains et l’environnement. Le Conseil d’État demande l’interruption des travaux (de terrassement). Il devrait statuer sur le fond du dossier à l’automne 2023.

Janvier 2022 – Nous assignons le gouvernement flamand à comparaître avec nos allié·es

En collaboration avec Bond Beter Leefmilieu, BioForum et Velt, nous assignons à comparaître le gouvernement flamand, l’agence publique de gestion des déchets (OVAM ou Openbare Maatschappij voor Afvalstoffen) et Lantis (le maître d’ouvrage de la liaison d’Oosterweel). En effet, tous étaient au courant de la contamination des sols par les PFAS et de ses effets potentiels sur l’environnement et la santé publique dès 2017, mais ont choisi de ne pas en informer la population. Ce faisant, le gouvernement a violé son devoir d’information, son “devoir de vigilance” et le droits humains. Le procès suit son cours, et les plaidoiries seront probablement prononcées à l’automne 2023.

Septembre-novembre 2022 – Négociations et alliance d’assainissement

Sous la pression de nos actions en justice, des négociations avec le gouvernement flamand commencent. Assez vite, nous nous en retirons. Nous nous posons en effet des questions quant à la transparence du processus. Nous ne sommes pas disposé·es à abandonner nos poursuites. Nous disposons de trop peu de garanties qu’une approche fondamentalement différente est réellement insufflée dans le cadre de la liaison d’Oosterweel et de la pollution aux PFAS.

En novembre 2022, d’autres parties prenantes acceptent de former une “alliance d’assainissement” (Saneringsverbond) avec les autorités concernées. Il s’agit peut-être d’un pas en avant fait sous la pression de nos procédures. Mais nous émettons des réserves et nous pensons, en tant que partie prenante critique, qu’il est important de conserver notre bâton juridique. Nous ne participons donc pas à cette alliance.

Décembre 2022 – 3M annonce la fin des PFAS

Notamment grâce à la forte pression liée à son rôle dans la pollution aux PFAS dans notre pays, la multinationale 3M décide de mettre fin à sa production mondiale de PFAS d’ici 2025 au plus tard. Entre-temps, le gouvernement flamand a également conclu un accord d’assainissement avec 3M. C’est un bon premier pas pour faire payer le pollueur, mais ça ne suffit pas.

Nous maintenons donc la pression et nous nous portons également partie civile dans l’affaire pénale contre l’entreprise chimique. De cette manière, nous restons au courant du déroulement de cette affaire. Il nous sera ainsi plus facile d’aider les citoyen·nes à obtenir la reconnaissance de la responsabilité de 3M pour les dommages qu’elle a causés. 

Mise à jour de juillet 2023 – Des progrès significatifs ont été réalisés, mais nous restons vigilants

Grâce à nos procédures judiciaires et à la campagne menée avec le lanceur d’alerte Thomas Goorden et le collectif citoyen Grondrecht, nous avons déjà obtenu plusieurs résultats. Nous avons veillé à ce que le maître d’ouvrage, Lantis, et les organismes compétents, tels que l’OVAM et le ministère de la Santé flamand, fassent preuve d’une plus grande rigueur dans leur gestion de la liaison d’Oosterweel et de la pollution aux PFAS. Dans le courant de cette année, le Conseil d’État doit encore rendre un verdict final sur la légalité de l’approche actuelle, mais entre-temps, nous avons déjà franchi quelques étapes importantes :

  • Le Conseil d’État a déclaré illégal et a annulé le projet de construction d’une décharge illégale (appelée « berme de sécurité ») sur le site de 3M. Et toutes les futures terres contaminées doivent donc être assainies ou mises en décharge dans un site légal. Les terres contaminées ne serviront pas à construire d’autres bermes ou ouvrages quelconques.
  • Les terres fortement contaminées excavées à Zwijndrecht et Linkeroever – soit plus d’un million de mètres cubes – ont été assainies ou transportées dans une décharge légale, ce qui a déjà permis de réduire considérablement la quantité de terres fortement contaminées sur le chantier d’Oosterweel.
  • Entre-temps, des mesures des taux de pollution sont régulièrement effectuées sur le chantier et aux alentours. Un pic de PFAS a ainsi été mesuré en mai 2023 (mais les riverain·es en ont été averti·es trop tard). En outre, les normes et contrôles des eaux (de drainage) rejetées par les travaux ont été renforcés.
  • Une étude descriptive du sol et un plan d’assainissement pour le chantier d’Oosterweel sont également en cours de préparation. Selon le maître d’ouvrage, Lantis, leur coût sera entièrement à la charge de 3M, tout comme le coût de l’assainissement final. Nous tiendrons bien sur cela à l’œil.
  • La commission Vrancken a proposé un cadre d’action temporaire plus strict, qui renforcera la lutte contre toute pollution aux PFAS en Flandre. Néanmoins, des questions se posent encore et la légalité de ce cadre d’action doit être vérifiée par le Conseil d’État.
  • Suite à la publication des premiers résultats alarmants d’analyses sanguines par Grondrecht en 2021, les autorités ont fini par lancer une campagne à grande échelle permettant à 80 000 riverain·es concerné·es de réaliser gratuitement une analyse sanguine.

Dans cette affaire, un des plus grands scandales sanitaires que notre pays ait connus, le gouvernement a été pris en défaut pour son manque de protection de la population. Il est revenu aux citoyen·nes et aux ONG de mettre la pression. Dans des moments pareils, le recours à la justice est une tactique parfois nécessaire. Dans le cas présent, elle nous a permis d’exercer la pression indispensable pour convaincre les autorités d’agir.

Aidez-nous, faites un don à l’occasion des dernières étapes de notre procédure devant le Conseil d’État afin que nous puissions obtenir un précédent important pour l’environnement et la santé grâce à un arrêt sans concession du Conseil d’État.

Votre soutien financier nous aidera également lors des procédures judiciaires à venir contre 3M, par lesquelles nous veillerons à ce que le pollueur paie pour les dommages encourus et pour la dépollution.

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