Les solutions pour empêcher le déraillement du climat et le naufrage de la nature sont connues. Pourtant, l’accord de libre-échange UE-Mercosur nous entraîne dans la direction diamétralement opposée : davantage de viande et de produits laitiers, de monoculture, de pesticides et de voitures ! Voici 6 raisons de rejeter l’accord commercial entre l’UE et quatre pays du Mercosur (Brésil, Argentine, Uruguay et Paraguay).

#1 Qui veut encore échanger des voitures contre des vaches ?

Des voitures allemandes en échange de vaches sud-américaines, voilà comment on présente parfois l’accord commercial UE-Mercosur. Mais l’accord prévoit aussi d’exporter des machines, des produits chimiques et des médicaments européens (souvent illégaux à l’intérieur de nos frontières), et d’importer de la volaille, du sucre et de l’éthanol.

Il est impossible de concilier le « Green Deal » de l’UE, la stratégie « de la fourche à la fourchette » et la stratégie européenne en matière de biodiversité avec ce nouvel accord commercial qui donnera un nouvel élan à l’agriculture industrielle et aux industries automobile et chimique européennes.

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#2 De l’huile sur les feux d’Amazonie

Voici pourquoi la Belgique doit rejeter l’accord UE-Mercosur

En important davantage de bœuf, de soja, de sucre et d’éthanol, l’UE augmente la pression sur les communautés indigènes et la nature en Amazonie, dans le Gran Chaco et le Cerrado.

L’élevage (y compris la culture du soja pour l’alimentation animale) est à l’origine de plus de deux tiers de la destruction de la nature en Amazonie brésilienne et dans le Cerrado, ainsi que dans la région du Gran Chaco en Argentine et au Paraguay. L’année dernière, plus d’un million d’hectares de forêt tropicale amazonienne y ont pris feu. Les incendies sont encore pires cette année : sur ces dix dernières années, c’est la plus mauvaise que le Brésil ait connue.

Voici pourquoi la Belgique doit rejeter l’accord UE-Mercosur

L’accord UE-Mercosur encourage la politique destructrice du président brésilien Jair Bolsonaro. Contrairement à ce que certains avancent, comme le député européen Geert Bourgeois (N-VA), l’accord ne sert pas du tout de « levier pour les droits de l’homme, les droits des travailleurs, les critères de durabilité et les normes produits ». Nous ne voyons aucune preuve que la politique commerciale européenne contribue au développement durable, bien au contraire.

En effet, même sans cet accord, l’Europe est déjà un partenaire commercial stratégique et irremplaçable du Brésil. L’UE est le deuxième partenaire commercial du Brésil, le deuxième importateur de soja brésilien et un grand importateur de bœuf brésilien. Malgré cette relation économique étroite, l’Union n’a jamais été prête pour influencer la désastreuse politique environnementale de Bolsonaro.

L’accord ne contient qu’un engagement de pure forme en faveur de la protection du climat et de la biodiversité. L’accord d’association donne à la protection du climat et de l’environnement un statut juridique faible. Le chapitre sur le développement durable de l’accord de libre échange (ALE) ne permet pas non plus de compenser son impact sur le climat, car il ne fait pas partie de la partie contraignante de l’ALE.

#3 Un accord du siècle dernier

Les négociations UE-Mercosur se déroulent en coulisses depuis plus de 20 ans. Le mois dernier, Greenpeace a divulgué l’accord d’association entre l’Union européenne et les pays du Mercosur, duquel il ressort clairement que l’accord met en place des structures qui échappent aux processus décisionnels démocratiques, et dont les décisions peuvent entrer en conflit avec celles du Parlement européen et des parlements nationaux.

Les ALE sont conçus pour détourner l’attention du public de la prise de décision sur des questions clés telles que l’agriculture, les ressources énergétiques, les droits du travail et les produits chimiques. L’accord final de 2019 a été mandaté, négocié et approuvé en secret, sans apport de la société civile (alors que le lobby des entreprises était activement impliqué dans certaines parties des négociations) ni consultation des PME. L’étude d’impact sur la durabilité (Sustainability Impact Assessment-SIA) a été publiée après la fin des négociations officielles, et n’a donc pas pu être prise en compte pendant celles-ci.

Les textes publiés ayant fait l’objet de la fuite restent incomplets, et certaines négociations se poursuivent encore en coulisses, sans qu’on en sache quoi que ce soit. Greenpeace estime que les accords sur le commerce et les investissements doivent être mandatés, négociés, conclus et révisés de manière transparente et démocratique.

#4 Une concurrence déloyale pour les (nos) agriculteurs

Les petits agriculteurs (tant en Europe que dans les pays du Mercosur) ont du mal à concurrencer la production agricole industrielle qui sera la principale bénéficiaire de la baisse des droits de douane à l’importation prévue par l’accord de libre-échange. L’agriculture industrielle des pays du Mercosur ne répond pas non plus aux normes plus strictes imposées aux agriculteurs européens (à propos des OGM, des engrais, des antibiotiques et des pesticides, y compris ceux qui sont interdits dans l’UE).

#5 Moins de protection pour les consommateurs

L’UE attache une grande importance à la qualité et à la sécurité des aliments, ce qui se reflète dans sa nouvelle stratégie « de la fourche à la fourchette ». Mais l’accord commercial UE-Mercosur mettra sur le marché des produits qui ne correspondront pas à nos normes. En conséquence, la qualité de la nourriture dans nos assiettes risque de se détériorer. Ce n’est pas une surprise à partir du moment où des accords commerciaux donnent clairement la priorité aux intérêts économiques plutôt qu’à la préservation de la planète et au bien-être des populations.

#6 Seules les grandes entreprises seront gagnantes

Le libre-échange s’est avéré à maintes reprises ne profiter qu’aux grandes entreprises, au détriment du travailleur moyen et de la planète.

Les gagnants : les plus grands producteurs de pesticides basés en Europe, tels que BASF ou Bayer-Monsanto. Entre 2016 et 2019, leurs ventes de pesticides (interdits en Europe) au Brésil ont augmenté respectivement de 44 % et 50 %.

L’accord UE-Mercosur prévoit des tarifs douaniers préférentiels pour l’exportation de produits chimiques européens vers les pays du Mercosur, qui sont de grands consommateurs de pesticides. Le Brésil, l’Argentine et le Paraguay, par exemple, figurent tous parmi les dix premiers utilisateurs des pesticides extrêmement dangereux de Syngenta, et représentent 39 % du chiffre d’affaires de la société (à lui seul, le Brésil en représente 32 %).

Les perdants : le chapitre qui traite des PME ne fait que quatre pages, et ses dispositions ne sont pas contraignantes. Les PME ne sont clairement pas une priorité pour ceux qui ont négocié cet accord.

Celui-ci est taillé sur mesure pour les grandes entreprises. Il est difficile pour les petites entreprises de partager les bénéfices que les accords commerciaux peuvent apporter.

Enfin, nous renvoyons encore à l’Évaluation de l’impact sur le développement durable de la Commission européenne pour démonter le mythe des jobs, jobs, jobs. À la page 394, des tableaux indiquent par secteur le nombre estimé d’emplois qui seraient créés ou perdus dans le cadre de l’accord UE-Mercosur. Les quelques chiffres indiquant des créations d’emplois sont négligeables. Qui est prêt à sacrifier la forêt amazonienne pour si peu ?

Lisez aussi : Les mythes de l’accord UE-Mercosur

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