La semaine dernière, le Parlement européen a signé un accord qu’il est difficile de décrire autrement que comme « une condamnation à mort pour l’agriculture à petite échelle et la nature ». Nous demandons à la Commission européenne de revoir sa copie (#WithdrawTheCAP).

De quoi s’agit-il ? La nouvelle politique agricole commune (PAC) détermine la taille et les bénéficiaires des parts du gâteau pour les 7 prochaines années (2023-2029). En l’occurrence, le gâteau est le budget agricole de l’UE qui se monte à pas moins de 387 milliards d’euros (!). C’est un soutien qui façonne en grande partie l’agriculture européenne et notre production alimentaire. 

Eh bien, c’est comme si rien n’avait changé : en conséquence de cet accord, la nouvelle PAC favorisera encore plus le même type d’agriculture à grande échelle et d’élevage intensif nuisibles au climat et à notre environnement, au détriment de la forêt amazonienne et de notre biodiversité. Il n’y a donc vraiment pas de quoi se réjouir.   

Pourtant, avant le vote crucial, de nombreux citoyens et organisations ont participé au débat, ce qui a eu pour effet d’augmenter la pression sur le Parlement européen. Via notre site web, 13.024 personnes ont envoyé un email à 12 parlementaires européens, leur demandant de ne pas approuver la proposition sur la table. Même Fridays for Future et Greta Thunberg ont réagi vivement sur Twitter avec le hashtag #VotethisCAPdown. Cette vidéo a été vue plus de 500.000 fois. 

Mais cela n’a pas suffi, les grands groupes de lobby et les intérêts commerciaux ont eu gain de cause. A l’issue du vote, les dirigeants politiques au sein du Parlement européen ont fait part de leur satisfaction à propos du compromis, alors que l’accord pour une nouvelle PAC n’est en aucun cas compatible avec le Pacte vert pour l’Europe grâce auquel l’UE veut prendre la tête de la lutte contre le réchauffement climatique.

6 raisons de l’échec de la nouvelle politique agricole de l’UE
Je soutiens l’agriculture écologique

Nous avons étudié l’accord pour vous. Voici (en bref) les principales raisons pour lesquelles il s’agit d’une mauvaise nouvelle pour notre climat et l’environnement.*

* Il existe également de bonnes raisons d’enterrer le projet actuel sur les plans social et économique, mais nous n’approfondirons pas cet aspect dans ce blog.

#1 Toujours de l’argent public pour les fermes-usines polluantes

Les conditions d’obtention des subventions agricoles européennes n’excluent pas l’élevage intensif. Pourtant, la commission de l’environnement du Parlement européen avait proposé de fixer un nombre maximum d’animaux par hectare pour tous ceux qui souhaitent bénéficier de l’aide européenne.

6 raisons de l’échec de la nouvelle politique agricole de l’UE

# 2 Guère de protection pour les tourbières et les prairies permanentes

Les tourbières séquestrent beaucoup de carbone et constituent un tampon important dans la lutte contre le réchauffement climatique. Leur drainage et exploitation libèrent une grande quantité de gaz à effet de serre. Selon le Parlement européen, les tourbières ne doivent pas être protégées par les agriculteurs, mais « correctement entretenues ». En adoptant cette formulation, le Parlement se retranche derrière la proposition de la Commission européenne.

Concrètement, cela signifie que les agriculteurs qui cultivent des tourbières asséchées peuvent toujours recevoir des subventions agricoles pour celles-ci. La PAC devrait inciter les agriculteurs à protéger ces zones et récompenser ceux qui le font, plutôt que de les encourager à les drainer rapidement.

Les prairies permanentes, d’autre part, sont cruciales pour la préservation de la biodiversité européenne. C’est pourquoi la Commission européenne a inclus dans sa proposition une interdiction de labourer (ou de convertir) les prairies permanentes dans les zones protégées Natura 2000. Dans l’accord adopté par le Parlement européen, cette interdiction a disparu et a fait place au concept très vague de « gestion appropriée ».

#3 Pas d’espace supplémentaire pour la nature

Dans le cadre des mesures dites « d’écologisation » de la PAC actuelle, les agriculteurs doivent réserver un pourcentage de leurs terres à la nature. Le Parlement européen maintient ce pourcentage à 5 % (comme c’est le cas aujourd’hui) et limite cette mesure aux champs. Par conséquent, cette mesure d’écologisation ne s’applique pas à plus de 40 % des terres agricoles, dont les prairies et les zones agroforestières. En outre, les cultures dérobées et les cultures fixant l’azote continueront à être considérées comme « naturelles », même si en réalité, il s’agit généralement de cultures productives. 

#4 Des « mesures environnementales » sans réel avantage pour l’environnement

Le budget consacré aux mesures agroenvironnementales dans le cadre du développement rural est largement survalorisé. Il contient un certain nombre de mesures telles que le financement des zones soumises à des contraintes naturelles (par exemple, pour l’agriculture dans les zones de montagne ou sur des sols très rocheux) qui, bien que justifiées, n’apportent pas de bénéfice environnemental spécifique.

6 raisons de l’échec de la nouvelle politique agricole de l’UE

#5 Les éco-régimes risquent d’être vidés de leur contenu

Les éco-régimes sont des paiements destinés aux agriculteurs qui souhaitent investir dans une production respectueuse du climat et de l’environnement. Ces régimes sont souvent présentés comme le fer de lance d’une PAC plus verte, mais nous constatons qu’ils sont encore affaiblis par :

– la liaison de l’aide avec des critères économiques ;

– la porte ouverte à de « fausses » mesures environnementales.

Par exemple, un élevage de 10 000 porcs entassés peut toujours obtenir des subventions s’il utilise des jouets en plastique pour réduire les attaques entre les animaux. Un autre exemple est celui de l’« agriculture de précision » qui, en l’absence d’une définition stricte, pourrait bénéficier de l’argent européen pour s’intensifier encore, sans nécessairement entraîner de bénéfices climatiques ou environnementaux. 

#6 Les États membres eux-mêmes ne peuvent pas être plus ambitieux en matière d’environnement

L’accord limite l’ambition environnementale des États membres. Par exemple, les pays ne peuvent pas imposer de normes supplémentaires à leurs agriculteurs qui souhaitent recevoir des subventions dans le cadre de la PAC. Pire encore, les États membres ne peuvent pas consacrer à une agriculture plus verte un budget plus élevé que ce qui est prévu dans l’accord.  

Et maintenant ?

La Commission européenne, le Parlement européen et les gouvernements nationaux doivent entamer prochainement des négociations, sous la présidence allemande du Conseil européen, et les conclure au début de 2021.

La proposition actuelle est une voie sans issue. Greenpeace demande à la Commission européenne de revoir sa copie #WithdrawTheCap.

Et vous ? Signez notre pétition pour davantage de soutien à l’agriculture plus écologique.

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