Thiès (Sénégal), 6 Octobre 2022 – Au deuxième jour d’audience de l’action judiciaire visant la fermeture de l’usine de farine de poisson polluante de Cayar, le Tribunal de grande instance de Thiès a reçu des preuves accablantes de la présence de métaux toxiques dans l’eau potable, ainsi que des documents vidéo montrant un camion de l’usine déversant illégalement ses déchets dans le lac qui est relié à la nappe phréatique. Le tribunal a mis l’affaire en  délibéré  à la date du 3 novembre, date à laquelle un jugement est attendu.

Le collectif Taxawu Cayar, qui a porté plainte contre l’usine, a qualifié ces révélations d’”odieuses” et déclaré que l’usine avait violé le droit de la communauté à un environnement sain en polluant l’air de la ville et sa source d’eau potable.

La salle de tribunal bondée a été informé d’une analyse indépendante effectuée par le Laboratoire d’hydrologie et de toxicologie de la Faculté de médecine de l’Université de Dakar, qui révéle des niveaux de chrome et de sélénium dépassant les limites légales dans l’eau du robinet de Cayar, et la présence de ces mêmes métaux toxiques en quantités élevées dans le lac Mbawane, qui est relié à la nappe phréatique[1].

Le tribunal a également reçu des images vidéo filmées au mois d’août de cette année, où des membres du Collectif Taxawu Cayar, des militants de Greenpeace Afrique et un huissier ont vu un camion de l’usine arriver au lac, y déverser des déchets liquides et repartir[2]. 

À l’extérieur du tribunal, la population de Cayar s’est mobilisée pour apporter son soutien au collectif Takhawou Cayar.

Allé Sy, porte-parole du collectif Taxawu Cayar, a déclaré :

“Les preuves sont là : les propriétaires de l’usine ont enfreint la loi et ont pollué notre eau et nous ont mis en danger, nous et nos enfants. Et ceci dans le seul but de faire du profit au détriment de notre santé, de la sécurité alimentaire et du bien-être des populations. C’est méprisable. Les habitants de Cayar sont impatients de voir cette usine fermer ses portes.”

Maître Bathily, avocat du collectif Taxawu Cayar, a déclaré

“L’usine a enfreint la loi environnementale de notre pays à plusieurs reprises – et voici des preuves indépendantes montrant le terrible impact de leur comportement insensible et inhumain. Nous ne pouvons que conclure que l’usine n’a pas dit la vérité au tribunal, aux médias et, plus choquant encore, aux habitants de Cayar et du Sénégal.”

Le Dr Aliou Ba, responsable de la campagne Océans de Greenpeace Afrique, a déclaré:

“Voilà comment fonctionne l’industrie mondiale de la farine de poisson. Ils volent notre poisson, ils nous privent de nos emplois, ils rendent le poisson inaccessible aux populations, et ils nuisent à l’environnement. Les profits générés par cette entreprise alimentent de grandes compagnies, et qui en paie le prix ? Ce sont les communautés locales de Cayar et d’Afrique de l’Ouest. Mais plus maintenant ! Les habitants de Cayar sont déterminés à se battre jusqu’à obtenir gain de cause.”

Notes aux rédacteurs

[1] Les analyses du laboratoire indépendant, qui ont suivi l’échantillonnage de l’eau vérifié par un huissier, ont révélé :

  • Des niveaux élevés de métaux toxiques dans l’eau du robinet, dont plus de trente fois le niveau de sélénium et quatre fois le niveau légal de chrome, selon le code juridique sénégalais NS-05-033, qui s’applique à l’eau potable. 
  • Des niveaux élevés de métaux toxiques dans l’eau du lac, dont près de quatre fois le niveau légal de sélénium et près de trois fois le niveau légal de chrome, selon le code juridique sénégalais NS-05-061, qui s’applique aux masses d’eau telles que les lacs.
  • De faibles niveaux d’oxygène dans l’eau du lac. Les résultats suggèrent que le lac Mbawane est pollué par des matières organiques biodégradables et que, par conséquent, le lac est mal oxygéné empêchant ainsi toute forme de vie aquatique. Cela concorde avec la documentation de Greenpeace Afrique d’un camion de l’usine déversant ses déchets liquides de poissons dans le lac.

[2] Disponible prochainement dans la médiathèque de Greenpeace : 

  • Des clips vidéo montrant un camion de l’usine de farine de poisson de Cayar déversant des déchets dans le lac Mbawane de Cayar, et des images de drone de l’usine.
  • Des photos des événements devant le Tribunal de grande instance aujourd’hui. (Veuillez noter que des photos de la précédente audience se trouvent également dans la bibliothèque).
  • Des interviews audio en français, wolof et anglais avec un membre de Taxawu, et Maître Bathily, avocat.

Greenpeace Afrique demande que :

  • Les gouvernements d’Afrique de l’Ouest éliminent progressivement toute production de farine et d’huile de poisson utilisant du poisson propre à la consommation humaine, en raison de son impact négatif sur l’environnement, la société et l’économie.
  • Les gouvernements d’Afrique de l’Ouest accordent aux femmes transformatrices de poisson et aux pêcheurs artisans un statut légal, leur ouvrant l’accès aux droits et avantages du travail, tels que la sécurité sociale et des droits de consultation dans la gestion locale de la pêche.
  •  Les entreprises européennes et asiatiques cessent de commercialiser la farine et l’huile de poisson produites à partir de poissons propres à la consommation humaine provenant de la région d’Afrique de l’Ouest.
  • Tous les États impliqués dans la pêche dans la sous-région ouest africaine établissent un régime de gestion régional efficace – en particulier pour l’exploitation des stocks partagés, tels que les petits poissons pélagiques – comme l’exigent le droit international, les lois nationales pertinentes, les politiques de pêche panafricaines et régionales, et d’autres instruments. Ce régime de gestion devrait être conforme à une approche de précaution et fondée sur les écosystèmes, en veillant à ce que le total des captures autorisées se situe dans des limites biologiques sûres.

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Coordinateur international de la communication, Greenpeace Afrique
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