Yaoundé, 20 février 2024 – Six semaines après avoir signé un accord de protection des forêts de 50 millions de dollars avec des bailleurs de fonds, la République du Congo a donné son feu vert à l’exploration pétrolière dans le parc national de Conkouati-Douli, l’aire protégée la plus riche en biodiversité du pays et qui abrite des communautés de pêcheurs depuis au moins le XIIIe siècle.

Le décret présidentiel de 1999 portant création de Conkouati interdit, entre autres, la prospection et l’exploitation pétrolières dans le parc et sa zone tampon.

La décision prise le 18 janvier par le Conseil des ministres du Congo d’octroyer un permis à “China Oil Natural Gas Overseas Holding United” est un embarras de plus pour les bailleurs de fonds dont l’engagement en faveur des forêts et de la biodiversité du Congo ne va pas au delà du greenwashing du régime Sassou aux frais des contribuables européens.

C’est aussi un coup porté à leur idéologie de “conservation forteresse”.

“Alors que le Nord continue de soutenir les écogardes au Congo et ailleurs, tristement célèbres pour leurs violences contre les populations locales sur leurs terres ancestrales, son amour de la nature s’accommode aux prédations des multinationales pétrolières, forestières et minières”, a déclaré le Dr Fabrice Lamfu Yengong, responsable de la campagne forêt pour le Bassin du Congo à Greenpeace Afrique.

Les principaux bailleurs de fonds institutionnels de Conkouati sont l’Union Européenne (UE), l’Agence française de développement (AFD) et le Fonds pour l’environnement mondial, administré par la Banque mondiale. 

L’UE est particulièrement compromise.  En septembre 2022, elle a signé une convention de financement de 800 000 euros avec l’ONG française Noé pour “assurer la gestion durable” de la faune et de la flore du parc.  Un mois plus tard, lors du sommet des Trois Bassins forestiers tropicaux à Brazzaville, le commissaire européen à l’environnement a signé une “feuille de route du partenariat forestier UE-Congo” destinée à “sauvegarder les forêts congolaises et à soutenir le développement de chaînes de valeur durables”.  L’accord a été “soutenu par 25 millions d’euros supplémentaires”, a tweeté le commissaire.

En décembre, lors de la COP28, l’UE, la France et une poignée de donateurs privés se sont engagés à mettre en place un “partenariat pour les écosystèmes forestiers, la nature et le climat” au Congo, doté de 50 millions de dollars.  Une semaine plus tard, le ministre des Mines a accordé un permis de prospection aurifère de 1 500 hectares dans la zone tampon de Conkouati à la société pétrolière chinoise Zhi Guo Pétrole.

La Norvège a également sa part de responsabilité dans le pillage de Conkouati.  En 2019, l’Initiative pour les forêts d’Afrique centrale (CAFI), menée par la Norvège, a signé une lettre d’intention de 65 millions de dollars avec le Congo.  Elle appelait simplement à “minimiser l’impact” du pétrole et de l’exploitation minière sur les forêts – sans aborder les intérêts de la Norvège dans le secteur pétrolier du Congo.  Aujourd’hui, la société norvégienne Petronor réalise des affaires record dans l’offshore.

En septembre dernier, l’UNESCO a inscrit le parc national d’Odzala-Kokoua, au Congo, sur sa liste du patrimoine mondial, passant mystérieusement outre la recommandation de l’UICN de différer  cette inscription.  Depuis des années, le parc (entouré de tous côtés par des concessions forestières) est le théâtre d’atrocités commises par des écogardes gérés par la firme sud-africaine African Parks.  Le travail de cette milice devrait bientôt devenir plus facile.  Le 7 février, le ministre congolais des Forêts a annoncé que le président avait ordonné la construction d’une nouvelle route goudronnée à Odzala…

“Quand les bailleurs de fonds apprendront-ils que le greenwashing de la kleptocratie ne fait que l’encourager ?” s’interroge et conclut le Dr. Lamfu. 

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